2ème dimanche de carême : L’heure n’est pas aux selfies ; la Transfiguration de Jésus
(Homélie du 2ème dimanche de carême, 12 mars 2017)
Si nous avions été privilégiés pour être avec Jésus sur la montagne, qu’aurions-nous fait ? Peut-être aurions-nous fait une photo pour l’envoyer immédiatement sur les réseaux sociaux ? Ou bien nous aurions tenté un selfie. Imaginons : Jésus, Moïse, Elie et moi sur la même photo ! Ou bien nous aurions pu envisager de faire une tente pour perpétrer l’événement, comme le suggère Pierre. On est si bien ici, sur la montagne. Restons-y et oublions le reste.
Mais Jésus ne veut pas de ses initiatives. Bien au contraire, il les décourage et, en plus, il faut ne rien dire, ne rien communiquer. « Il y a un temps pour tout », écrit Qohélet. Et ce n’est pas le moment de parler. En fait Dieu a un projet et il nous invite à entrer dans son projet à lui qui consiste à sauver. Il veut détruire la mort et de faire resplendir la vie, lit-on dans la 2ème lettre à Timothée. Je voyais une photo dans une revue, où un monsieur faisait pousser des plantes sur la terrasse de son immeuble au milieu d’autres immeubles détruits par la guerre en Irak. Croire que la vie peut encore germer. Nous avons besoin de tels gestes prophétiques aujourd’hui, car ils font le pari de la force de la vie plus forte que les forces de destruction.
A y regarder de près, la liturgie de ce 2ème dimanche de carême nous plonge dans le projet de Dieu.
- C’est d’abord Abraham qui se voit appelé à se mettre en route vers une destination inconnue. Il faut être fou ou un doux rêveur pour se lancer ainsi sur la route parce que la voix de Dieu a retenti. Sans doute a-t-elle trouvé un cœur suffisamment ouvert pour accueillir positivement cet ordre. Aujourd’hui nous aimons savoir où nous allons, planifier au maximum. Mais dans des circonstances particulières, lorsque la maladie intervient, lorsqu’un contretemps impose son rythme, nous sommes bien obligés de nous adapter. L’expérience nous montre que nous ne pouvons pas tout maîtriser. Sommes-nous capables d’accueillir tous ces aléas comme des appels où Dieu attend un geste, une parole, une posture ?
- Le récit de la transfiguration de Jésus fait de Pierre, Jacques et Jean des témoins particuliers d’un événement qui les arrache à la routine. Jésus avait annoncé un chemin de douleurs qui devait s’achever par la mort et la résurrection. Et voilà que sur ce chemin Jésus se fait connaître dans sa gloire, avec Moïse et Elie. Dieu se manifeste en Jésus. Il donne les indications nécessaires pour avancer sans crainte : Jésus est « mon Fils bien-aimé ». La voix avait déjà désigné Jésus de cette façon lors du baptême. Jean Baptiste en avait été le bénéficiaire. Peu à peu l’auditoire s’élargit : Pierre, Jaques et Jean entrent dans la confidence.
Mais ils doivent se taire. L’heure n’est pas aux selfies ! Il s’agit d’écouter : « Ecoutez-le ! » Pour comprendre le projet de Dieu, il convient donc d’écouter Jésus. À ses côtés, Moïse et Elie ne sont pas les figurants d’une grand son et lumière. Ils représentent les prophètes de l’Ancien Testament qu’il fallait déjà écouter. Jésus est Le prophète, celui qui avait été annoncé (Dt 18, 15). Il aura les mots appropriés pour expliquer que, dans tout ce qu’il entreprend, il veut détruire la mort et faire resplendir la vie. Nous allons le célébrer pendant la semaine sainte qui débouche sur la fête de Pâques. Mais nous pouvons aussi le célébrer dès lors que nous avons réussi à faire resplendir la vie au cœur là on pensait que la mort allait l’emporter.
Pour l’heure Pierre, Jacques et Jean reçoivent une mission : garder pour eux ce qu’ils ont vu pour en parler plus tard, lorsque le moment sera venu. Jésus prend date. Il nous est proposé, la semaine prochaine, de vivre une retraite à Lille pour être davantage « disciples missionnaires » en rejoignant les frères de Taizé. Sommes-nous prêts à y participer ? Sommes-nous prêts à écouter l’enseignement qui nous sera proposé pour mieux annoncer le message de l’évangile ? Sommes-nous prêts à entrer davantage dans le projet de Dieu pour faire resplendir la vie et l’immortalité ?
Père Christian