“Arrière, Satan” (Mt 4, 10)
Dans l’évangile du premier dimanche de carême, Jésus répond au “tentateur” : “Arrière, Satan” (Mt 4, 10). Mais quand on parle de Satan dans la Bible, de qui parle-t-on ?
Tout d’abord, le mot désigne un adversaire, au sens premier : celui qui s’oppose pour bloquer un chemin. Ainsi l’ange du Seigneur qui bloque la route de Balaam est un “satan” pour celui qui ne fait ce que Dieu lui a demandé (Nb 22, 22.32) ! Dans un autre sens, l’ennemi qui se dresse contre le roi est aussi un “satan” (I R 11, 14.23). Jusque-là on écrit “satan” avec un “s” minuscule.
Mais avec la réflexion, l’adversaire va peu à peu être identifié avec celui qui propose le mal. Dans le livre de Job, l’auteur imagine une conversation entre Dieu et Satan. Ce dernier va infliger une série de malheurs sur Job, avec la permission de Dieu, pour éprouver la fidélité de Job (Cf. Job 1 et 2). Il fait encore figure d’accusateur (cf. Za 3, 1-2 ; Ps 109, 6). Les derniers écrits de la première alliance vont identifier Satan avec l’esprit du mal (cf. I Ch 21, 1). On l’écrit maintenant avec un “S” majuscule !
Dans la nouvelle alliance Satan fait partie de la sphère du mal. En entrant en Judas il l’inspire d’aller jusqu’au bout de la trahison de Jésus (Jn 13, 27). De même il conduit Ananie à mentir (Ac 5, 3). Dans la pensée des premières communautés chrétiennes, Satan bâtit l’empire du mal (Ac 26, 18). Il empêche la parole de grandir dans les cœurs (Mc 4, 15). En Mt 13, le “Malin” sème l’ivraie (en grec “zizania”) dans le champ. Satan a tellement envahi les cœurs que certains sont accusés de faire partie de la “synagogue de Satan” (Ap 2, 13). Les images grandioses et fantastiques du livre de l’Apocalypse veulent montrer que la communauté de la nouvelle alliance l’emportera sur les forces du mal qui s’acharnent contre elle (Ap 12, 9 ; 20, 2.7).
Jésus a été en prise avec Satan (Mt 4, 10). Histoire exemplaire : là où le peuple d’Israël s’est compromis dans le péché, Jésus sort victorieux du combat contre la tentation. Il est mis à l’épreuve, mais manifeste sa fidélité à Dieu. Cette histoire exemplaire a un soubassement dans le ministère de Jésus. Le jour où il doit aller à Jérusalem, Pierre s’oppose à lui. Il devient son adversaire sur le chemin. Aussi Jésus lui répond sans ménagement : “Retire-toi ! Derrière-moi, Satan !” (Mt 16, 23). Une fois de plus, Jésus a choisi la fidélité à son Père plutôt que de renoncer au chemin que ce dernier lui a tracé.
Père Christian