Il parlait du sanctuaire de son corps (Jn 2, 15-22)

Ce qu’on appelle “la purification du temple” par Jésus laisse perplexe le lecteur de l’Évangile (Jn 2, 13-22). Comment Jésus, un homme si sage et compréhensif à l’égard des pécheurs, peut-il utiliser une telle violence dans les gestes ? Il chasse les vendeurs ainsi que les bœufs et les brebis, renverse les tables des changeurs et exige le départ des vendeurs de colombes. On pourrait penser qu’il est pris d’une sainte colère. Mais ce serait s’arrêter en chemin.

Pour comprendre le geste de Jésus, il est bon de le comparer aux actions symboliques des prophètes. Ils faisaient, devant leurs contemporains, des gestes étonnants, voire spectaculaires, au risque de déplaire ou de scandaliser. Ils cherchaient ainsi à susciter des réactions ou des questions de leur part et, ainsi, les amener à réfléchir sur leur rapport à Dieu. Les champions de ces actions ont été Jérémie, et surtout, Ezéchiel. Ainsi ce dernier a mimé la sortie d’un exilé pour préparer les gens de Jérusalem à quitter la ville. Le roi lui-même partira de cette façon (Ez 12, 1-20). En Ez 24, 15-24, le prophète, sur ordre de Dieu, n’observe pas le deuil rituel lorsque meurt son épouse.

Jésus s’inscrit dans cette veine prophétique. Il produit une action spectaculaire en arrivant au temple et provoque une question : « Quel signe nous montres-tu à travers cette action ? » Et il donne l’explication, comme le faisaient Ezéchiel et Jérémie. L’enjeu concerne précisément le signe essentiel par lequel Dieu marque sa présence au milieu du peuple. Autrefois c’était le temple de Jérusalem. Mais son temps est révolu. Jésus ne fait pas que renverser les tables, il mime le renversement du temple. Il s’agit moins de la purification du temple que de sa future déchéance. Historiquement, effectivement, il disparaîtra. En 70, l’armée romaine le détruira. En 135, les Juifs n’auront plus accès à son emplacement.

Mais Jésus va plus loin. Le temple et toutes les personnes qui y sont attachées deviendront inutiles. En fait, il propose un nouveau sanctuaire : son propre corps, signe nouveau de la présence de Dieu dans l’humanité (Jn 2, 19-21). La méprise sur le temps de construction (v. 20) indique bien la nature du symbole. Jésus avait en vue sa propre passion et son passage de la mort à la résurrection : « En trois jours je le relèverai » (v. 19). D’ailleurs l’auteur du 4ème évangile a bien pris soin de noter que la Pâque est proche (2, 13). Le corps ‘relevé’ du ressuscité devient désormais le centre du culte chrétien.

Père Christian

 

Représentation du temple de Jérusalem