Nul n’est censé ignorer la loi de l’Amour

(30ème dimanche de l’Année A)

L’épisode de l’évangile de Mt 22, 34-40 est célèbre. Jésus est questionné sur le plus grand commandement. Mise à l’épreuve pour celui qui paraît un Maître dans la connaissance des Écritures ! Comment va-t-il s’en sortir alors que la synagogue juive reconnaissait 613 commandements positifs, 365 interdictions et 248 autres prescriptions ! Comment s’y retrouver ? D’ailleurs il suffit de lire les premiers livres de la Bible pour constater le nombre de lois proposées au peuple de Dieu. Le décalogue est sans doute le plus connu (Ex 20, 1-17 et Dt 5, 6-21). Mais il y a aussi le code de l’alliance (Ex 21-23), le livre du Lévitique qui livre quantité de prescriptions pour différentes catégories de personnes, le Deutéronome qui semble reprendre des lois déjà édictées.

La réponse de Jésus est classique : en énonçant l’amour de Dieu il ne se trompe pas. C’est effectivement le socle de la religion d’Israël énoncé en Dt 6, 4. Il ne se trompe toujours pas en donnant le deuxième : l’amour du prochain est une prescription de Lv 19, 18 qui conclut un passage où la justice doit l’emporter sur toute démarche de vengeance. Mais déjà il va plus loin de la question ! Les deux commandements de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain font bien partie de l’alliance.

En fait l’originalité de Jésus vient de ce qu’il annonce : le deuxième est semblable au premier. Il met l’amour de Dieu et l’amour du prochain sur le même plan. Ils sont indissociables. Le lien est sans doute ancien. Le décalogue les rapprochait déjà. En effet les premiers commandements qu’il contient concernent le respect dû à Dieu. Les autres orientent le croyant au respect du prochain, à commencer par les parents. Les prophètes vont insister sur la vérité des sentiments religieux. Il ne sert à rien d’offrir des sacrifices à Dieu si, dans le même temps, le croyant se montre injuste dans les relations avec les autres (Am 5, 4-15).

On peut penser que les premières communautés chrétiennes ont médité le message de Jésus. En Mt 5, 23-24, le croyant est invité à vivre une démarche en vérité lorsqu’il dépose son offrande à l’autel. Mais c’est Jean qui se montre le plus incisif : « Si quelqu’un dit : ‘J’aime Dieu’ et qu’il haïsse son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, ne peut aimer Dieu qu’il ne voit pas » (I Jn 4, 20).

Ainsi non seulement les deux commandements sont complémentaires, mais ils sont nécessaires l’un à l’autre. L’amour de Dieu se déploie dans l’amour du prochain et l’amour du prochain est comme une vérification de l’amour pour Dieu. Nous voilà avertis. Nul n’est censé ignorer la loi de l’amour.

 

Père Christian Berton

 

Jésus à la synagogue. Fresque anonyme du XIeme siècle. Autriche.