Préparer la Pâque nouvelle (Homélie du 6 juin 2021)

La fête du Corps et du Sang du Christ nous fait entrer dans l’espérance de vivre en communion avec  le Seigneur et les uns avec les autres. Nous le savons par expérience : l’union des cœurs est difficile à réaliser. Les disciples de Jésus eux-mêmes avaient beaucoup de difficultés à s’entendre, mais voilà qu’il leur propose une façon de vivre la communion qui va les surprendre.

Jésus invite à célébrer la Pâque et voilà qu’il innove. Les rites étaient anciens. Ils avaient leurs racines dans la vie des nomades. Mais les événements de la sortie d’Egypte leur avaient donné une signification nouvelle : il revenait au maître de maison d’en révéler le sens à tous les membres de la famille rassemblée pour l’occasion. Manger la Pâque, manger l’agneau pascal, c’était se souvenir de la libération de l’esclavage où le Pharaon avait maintenu le peuple. Dieu avait sauvé son peuple.

Lors du dernier repas, le Jeudi Saint, Jésus innove car il dit des paroles jamais entendues : « Prenez, ceci est mon corps » et « Ceci est mon sang, le sang de l’alliance ». Il y a un brin de scandale : comment peut-il se permettre de changer les paroles codifiées depuis si longtemps ? Qui est-il pour oser défier les coutumes du peuple ? Surtout, comment peut-il dire, à partir du pain et du vin, qu’en fait, il s’agit de lui ?

Jésus innove car il fait entrer dans une alliance nouvelle. En fait les prophètes l’avaient annoncée. Jésus la réalise. Il en est le « médiateur », dit la lettre aux Hébreux, celui par lequel le croyant peut entretenir le lien avec Dieu. Parce que, parfois, l’entente entre les gens est difficile, nous avons besoin de médiateurs pour faciliter les relations sociales : des personnes qui permettent à d’autres de se connaître, de se parler, de créer des liens ou, dans bien des cas, de renouer des liens distendus par des situations compliquées. Jésus est venu précisément pour cela : faciliter les liens avec Dieu, alors que nos erreurs et nos fautes nous en ont éloigné.

Pour cela Jésus nous fait entrer dans la logique du don : il donne le pain, il donne la coupe… Il donne ce qui est essentiel pour la vie. Le pain symbolise la croissance du corps, le vin la joie de la fête, comme à Cana, comme dans beaucoup de fêtes. Le don s’oppose à toute volonté d’égoïsme. Il faut sortir de l’individualisme qui nous colle à la peau : penser au bonheur de l’autre plutôt qu’à son propre bonheur,  prendre ce que j’ai de plus précieux pour la vie de l’autre. C’est précisément ce que Jésus veut faire : donner sa vie pour nous. La Cène du Jeudi Saint préfigure en actes et en paroles le don de lui-même, lors de la Passion du Vendredi Saint. Il faut avoir aimé jusqu’au bout, sans compter, pour entrer dans une telle logique.

Alors il nous revient de nous tenir prêts pour préparer la Pâque du Christ, pour accueillir le don qu’il fait de lui-même pour nous. Bien sûr il ne s’agit pas de trouver une salle. Ce qui compte, c’est de trouver, dans les cœurs, l’espace où ce don peut être reconnu et accueilli. Deux exemples :

  • Notre doyenné ‘Ville de Lille’ réfléchit, à partir d’une démarche synodale, sur la manière d’être plus missionnaires ici et maintenant. Voilà bien un espace ouvert où il nous revient de créer de la communion en nous nourrissant du don que le Christ fait de lui-même. Nous y reviendrons.
  • En ce 6 juin, nous aurions dû célébrer à Roubaix, autour de notre Père évêque, la fête de ‘Tous en chœur avec Jésus’. Un grand rassemblement des familles était prévu, mais la COVID nous a obligé à repousser l’événement au 12 juin 2022. L’année pastorale à venir orientera notre réflexion sur les familles : encore un espace privilégié où se vit quotidiennement la logique du don de soi et de l’accueil de l’amour. A nous de l’embellir et de le préparer.

Christian Berton

 

 

Textes du dimanche 6 juin 2021 (AELF)