Que devons-nous faire ?

« Que devons-nous faire ? » La même question posée par trois groupes de personnes (Lc 3, 10-14) traverse les siècles et arrive jusqu’à nous. Il y a tellement de « il faut », « y’a qu’à » sans suite dans les discours de toutes sortes. L’Eglise n’est pas exempte. Deux remarques nous indiquent que la question préoccupe bien les esprits dès les premières communautés chrétiennes.

  • On retrouve la même question dans la bouche d’un légiste (Lc 10, 25), d’un notable (18, 18), des auditeurs de Pierre le jour de la Pentecôte quand ils lui demandent : « Que devons-nous faire ? » (Ac 2, 37). Elle prélude d’autres questions de la part de personnes aussi différentes que celle d’un geôlier de prison (Ac 16, 30) ou que Paul lui-même (22, 10). Luc est le seul à insister sur ce « faire ».

 

  • Par ailleurs nous notons que les réponses de Jean-Baptiste varient en fonction des personnes. A la foule anonyme il propose le partage (vêtements, nourriture), aux collecteurs d’impôts, l’honnêteté, ce qui n’était pas leur point fort, aux soldats tentés de s’imposer par la violence, le respect. A chacun d’exprimer dans les faits son adhésion au message de la Bonne Nouvelle, à partir de sa situation particulière.

 

Jean est donc précurseur, selon l’adjectif qu’on lui attribue depuis longtemps, et cela de deux manières.

  • D’une part il annonce Jésus qui, dans son ministère, n’aura de cesse de joindre l’acte à la parole. Il suffit de lire les évangiles, par exemple celui écrit par Luc. Quand il mentionne une parole signifiant l’accueil des pauvres, des malades ou des pécheurs, il y joint le geste qui l’authentifie. Ainsi la parabole du père et des deux fils montre que le cadet, quand il revient à la maison, est reçu par le père qui déborde de tendresse et de miséricorde à son égard : « il est remué jusqu’aux entrailles » (Lc 15, 20). La parabole répondait à ceux qui reprochaient à Jésus d’aller manger chez les pécheurs (15, 1-2). La parabole explique le geste déjà posé.

 

  • Mais la parole de Jean atteint aussi les croyants. Quelle que soit la situation dans laquelle ils se trouvent, il leur revient de chercher le geste, l’action ou la posture par laquelle ils rendront explicite leur foi. Au légiste qui demande : « que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? » (Lc 10, 25), Jésus répond en énonçant le commandement de l’amour : « Fais cela et tu vivras » (v. 28). Et après avoir raconté la parabole du samaritain, il lui demande : « lequel s’est montré le prochain de l’homme tombé entre les mains des bandits ? » (v. 37). Ce dialogue se termine sur deux mentions du verbe faire : « C’est celui qui a fait preuve de bonté avec lui » (mot à mot : qui a fait miséricorde avec lui). La conclusion du Maître ne souffre pas de plus ample discussion : « Va et, toi aussi, fais de même » (v. 37). L’évangile ne dit pas si le légiste s’est engagé sur le chemin ainsi balisé. Mais il montre la direction à suivre : l’amour de Dieu et du prochain ne se contente pas d’une déclaration de principe. Il se déploie dans un « faire » qui ne dépend que de la disponibilité du disciple.

 

Père Christian

 

Le retour du fils prodigue (Rembrandt). L’Hermitage.