Souvenir de la Montagne (Mc 9, 2-10)
Dans la Bible on va rarement à la montagne par hasard. Quand Abraham se déplace vers une montagne, c’est pour y vivre une expérience fondamentale, celle d’une foi absolue en Dieu. Pourtant l’ordre donné était déroutant (Gn 22, 1-19). Moïse, quant à lui, fait plusieurs fois l’ascension du mont Sinaï pour rester en présence de Dieu et recevoir de lui les tables de la Loi (Ex 19-34). Pierre, Jacques et Jean, quand ils gravissent la montagne, ne savent pas qu’ils vont vivre un moment fort de leur vie de disciple (Mc 9, 2-10). Ce qu’ils voient de Jésus n’a rien de comparable avec ce qu’ils connaissent de lui.
Déjà le trio avait accompagné Jésus chez le chef de la synagogue (Mc 5, 37). Ils ont vu comment Jésus a fait se lever la petite fille considérée comme morte. Mais les trois mêmes se retrouvent au jardin de Gethsémani. Alors que Jésus leur recommande de veiller et de prier, ils dorment (Mc 14, 33-42). Ces deux événements encadrent cet autre où Jésus est transfiguré sur la montagne.
L’évangéliste raconte l’histoire de Jésus en prenant bien soin de marquer les étapes. Celle de la transfiguration donne à voir et à entendre. A ce titre, elle anticipe sur la mort et la résurrection de Jésus.
- Les trois apôtres voient Jésus dans la gloire, s’entretenant avec Moïse et Elie. Ces deux derniers sont des références incontestées : comme prophètes ils n’ont pas cessé de promouvoir l’alliance que Dieu avait conclue avec le peuple.
- Pierre, Jacques et Jean entendent une voix : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Écoutez-le » (Mc 9, 7). On se souvient d’une telle déclaration au baptême de Jésus mais elle ne s’adressait qu’à lui seul. Ici elle s’adresse aux trois apôtres. D’autre part l’invitation à l’écouter se fait l’écho d’une annonce de Moïse, en Dt 18, 15 : « C’est un prophète comme moi que le Seigneur ton Dieu te suscitera du milieu de toi : c’est LUI que vous écouterez ». Jésus est véritablement LE prophète suscité par Dieu. Il est le nouveau Moïse par lequel Dieu va faire alliance avec son peuple.
Alors Pierre Jacques et Jean sont-ils vraiment privilégiés d’accompagner Jésus sur la montagne ? Cela paraît peu tant leur rôle est minimisé. Ils ne semblent pas comprendre ce qui se passe. Ils sont effrayés ! Mais Jésus prend date. Aux pires moments de l’arrestation et de la passion Jésus est seul. Tous s’enfuient (Mc 14, 50-51). Mais à la résurrection il reviendra à Pierre, Jacques et Jean de se souvenir de l’événement de la montagne. Alors ils pourront témoigner ce que signifie « ressusciter d’entre les morts » (Mc 9, 9-10) et proclamer que Jésus est le Fils de Dieu (Mc 1, 1 ; 1, 11 ; 15, 39). A la transfiguration, tout est manifesté par anticipation, mais rien ne peut encore être dit. Ce sera la tâche des apôtres après la résurrection parce qu’ils auront vu et entendu.
Père Christian